Comment PAXX veille sur notre ADN

Surveiller l’intégrité de l’ADN, telle est la fonction des nombreux systèmes de réparation présents dans nos cellules, spécialisés dans la détection et la correction d’anomalies spécifiques. Parmi celles-ci, les cassures de la double chaîne d’ADN ou cassures double-brin sont particulièrement graves puisqu’elles peuvent conduire à la mort cellulaire. L’effet létal des cassures double-brin est d’ailleurs exploité pour éradiquer les cellules cancéreuses sous l’action de la radiothérapie et de certaines chimiothérapies. Dans une étude publiée dans Sciences Advances, des scientifiques de l’IPBS et de l’I2BC ont visualisé des étapes de l’assemblage moléculaire permettant aux cellules de réparer les cassures double-brin, en particulier celles impliquant la protéine PAXX.

L’ADN est une molécule fragile qui casse facilement, par exemple lors de vols aériens ou spatiaux sous l’effet du rayonnement cosmique, lors d’expositions à la radioactivité ou aux rayons X, ou du simple fait que les cellules croissent en présence d’oxygène réactif. Le système dominant de réparation des cassures double-brin dans les cellules humaines est la Jonction d’Extrémités Non-Homologues ou NHEJ, qui coordonne de nombreux acteurs protéiques pour détecter les cassures, les protéger, les épurer et finalement les ressouder. Parmi toutes les protéines impliquées, PAXX est la toute dernière, identifiée en 2015 mais dont le rôle n’était pas complétement connu. Une collaboration internationale vient d’établir comment PAXX fonctionne dans la NHEJ. Quand l’ADN est cassé, la protéine Ku encercle très rapidement les extrémités de la cassure, grâce à sa forme de bouée, et sert d’amarre pour les protéines suivantes. Par deux techniques qui permettent de visualiser les protéines à l’échelle atomique (cristallographie et cryo-microscopie électronique), les chercheurs ont capturé le moment où PAXX s’arrime à Ku et ont identifié précisément leurs zones de contact. Ils ont montré que PAXX opère en binôme avec XLF, fixé à Ku du côté opposé (Figure ). Lorsque ces sites de contact sont détruits par des mutations, la réparation des cassures ne se fait plus et la cellule meurt. Outre son aspect fondamental, ce travail ouvre des perspectives thérapeutiques. En effet, des molécules qui bloqueraient l’assemblage de PAXX et/ou de XLF sur les cassures de l’ADN pourraient augmenter la vulnérabilité des cellules cancéreuses aux cassures double-brin de l’ADN et à terme augmenter l’efficacité des traitements conventionnels basés sur la radiothérapie et certaines chimiothérapies.

Figure : L’hétérodimère Ku, un anneau flexible
A. Structure de Ku lié à l’ADN, déterminée par cristallographie aux rayons X. L’ADN, en brun est lié à l’anneau Ku composé des deux sous-unités Ku80, en magenta et Ku70, en rose. B. Structure de Ku lié à deux facteurs de réparation par leur motif peptidique spécifique respectif : XLF, en vert sur la sous-unité Ku80; PAXX, en bleu sur la sous-unité Ku70. Ku se déploie des deux côtés comme un papillon lors de la liaison des deux facteurs. © Seif-El-Dahan (I2BC)

Source

PAXX binding to the NHEJ machinery explains functional redundancy with XLF.
M Seif-El-Dahan1-†, A Kefala-Stavridi†, P Frit†, SW Hardwick†, DY Chirgadze, TM De Oliviera, S Britton, N Barboule, M Bossaert, AP Pandurangan, K Meek, TL Blundell, V Ropars*, P Calsou*, JB Charbonnier*, AK Chaplin*. Science Advances DOI: DOI: 10.1126/sciadv.adg2834. † co-1er auteurs; * co-auteurs séniors

Contact

Sébastien Britton (Sebastien.Britton@ipbs.fr), Patrick Calsou (Patrick.Calsou@ipbs.fr), Philippe Frit (Philippe.Frit@ipbs.fr)

Contact presse

Françoise Viala (communication@ipbs.fr)

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